chapitre 2 , 3 : une ombre

La veillée n'avait durée longtemps.

La naufragée piquait du nez sur la table, Seal regarda Nour d'un air entendu et celle-ci lui indiqua du menton l'échelle de meunier. Le jeune homme grimpa en premier, une lanterne à la main, et montra à sa protégée une paillasse recouverte de peaux au fin fond du grenier.

- Je te laisse la lanterne. Elle brûlera encore une petite courte. Je te laisse aussi ma cape. Couvres-toi bien, les nuits sont fraîches.

Elle se laissa tomber sur sa couche, sans un regard pour le fatras qui l'entourait.

Seal se dirigeait vers l'échelle, quand il l'entendit murmurer timidement:

- Merci.

Elle n'était pas si pimbêche que cela, après tout...Ne jugeant pas utile de répondre, il descendit pour la laisser s'installer.

La lanterne n'avait pas fini de brûler qu'elle s'était déjà endormie.

La baraque grinçait de toutes parts, le bois semblait vivant et reprendre ses droits. Au sein des ténèbres, des chuchotements perturbaient le sommeil de la jeune fille, qui se tournait, s'enfouissait à mesure sous les douces fourrures.

Un bruit plus particulier la réveilla vraiment: on aurait dit un verre se brisant sur du carrelage, les éclats roulant infiniment sur le dallage. Assise au milieu du lit, serrant très fort la cape de Seal, elle guettait avec angoisse le moindre son ou mouvement qui aurait pu la rassurer sur ce qui venait de se passer. La même impression de terreur que lorsqu'elle était dans l'arbre la clouait sur place, incapable de respirer convenablement. Un air glacé s'installa dans le grenier.

Des battements d'ailes claquèrent au-dehors. Une silhouette blanche passa auprès d'elle, arrivant dans son dos pour filer vers le rez-de-chaussée, lui arrachant un cri d'effrois. Le fantôme s'arrêta un instant, puis disparu en bas.

Les chuchotements reprirent.

Tendant l'oreille, elle remarqua l'ébullition de quelque produit, une fumée bleutée envahissant peu à peu ce qu'elle pouvait apercevoir du rez-de-chaussée. Elle passa juste ce qu'il fallait de sa tête dans le trou pour voir en bas, mais le brouillard bleuté était trop dense. Se penchant un peu plus, elle vit Nour jeter une poignée de terre dans la petite casserole, et l'ombre la frôler. Quelque chose scintilla dans les effluves, elle pensa aussitôt à un couteau.

"Il faut que je la prévienne, il faut que je la protège!"

Sa pensée agit plus vite qu'elle, ses muscles se tendirent sans qu'elle s'en rende compte, et son cri précéda sa chute.

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